Faune du sol et éco-système

Le sol est la partie superficielle de la croûte terrestre. A l'échelle de la planète, cela ne représente qu'un fine couche ; mais l'agriculteur ou le forestier en saisissent bien l'importance. C'est dans le sol que germent les graines ; dans le sol, aussi, que se recycle la matière organique. Les caractéristiques physiques, chimiques et biologiques du sol (porosité, pH, disponibilité des minéraux et de la matière organique...) conditionnent donc le fonctionnement de tout l'écosystème. Mais, à l'inverse, les facteurs climatiques, le type de végétation, la présence ou l'absence de faune, la nature de la roche-mère, influent également sur la formation et l'évolution des sols.

Dans ce processus complexe, la vie microscopique et macroscopique jouent un rôle considérable, au point que l'on puisse considérer que cette vie microbienne, fongique, et la faune de toutes tailles sont inséparables du sol lui-même dans sa composante minérale, chimique, organique ... On peut considérer d'une certaine façon que la composante vivante et la composante inerte n'existeraient pas l'une en absence de l'autre, elles sont inséparables en pratique.

Peut-on alors dire que c'est un abus de langage de considérer que le sol est en fait un ensemble d'éléments en interaction, et pas seulement le support de culture que certains considèrent ? Je ne le crois : le sol est un système, un éco-système. Et le bousculer sans ménagement n'est pas seulement un problème, c'est un crime écologique.

Et ce crime est commis chaque jour pourtant ! Au vu et au su de tous, et par ceux que l'on suspecterait le moins de le vouloir commettre: les acteurs du monde agricole, qui soupoudrent allègrement le sol de produits en "-cide", ce qui veut dire tuer, si je ne m'abuse ?

Et qui éventrent le sol, en portant à la lumière les êtres de l'obscurité et de la profondeur, les exposant mortellement aux ultra-violets.

Et qui usent des intrants comme en cuisine, dans l'immédiateté, sans connaissance précise de la dimension diachronique, pas plus que synchronique d'ailleurs, de cet univers qu'ils utilisent à leurs fins (et pour leur faim).

Il est temps que cela change, et que l'on se rappelle ce que le monde paysan d'antan savait mieux que celui d'aujourd'hui, et que le philosophe résume d'une phrase: le tout est plus que la somme des parties.

Alors la prochaine fois que vous irez dans un champ, vous, qui êtes parés des vertus de la science, ne regardez pas que la chimie du sol, levez la tête, et regardez tout ce qui rampe, court, saute, vole, creuse dans notre beau pays, fouissant, digérant, se décomposant, ce qui est au moins aussi important !